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Travel Stories : Écologie et diversité, mon aventure à la réunion de l’ESA 2023

Par Rolando Trejo-Pérez, étudiant en doctorat à Institut de recherche en biologie végétale, Université de Montréal

L’été dernier, du 6 au 11 août 2023, l’une des plus importantes réunions internationales sur l’écologie s’est tenue au « Portland Convention Center »: la réunion annuelle de l’ « Ecological Society of America (ESA) ». Ce fut une semaine remplie de conférences, d’ateliers et de posters couvrant un large éventail de sujets théoriques et pratiques dans le domaine de l’écologie. Par exemple, y furent abordés l’influence des changements climatiques sur le développement des écosystèmes, la restauration écologique, les invasions biologiques, les mycorhizes, et la gestion de la végétation dans les écosystèmes urbains et semi-naturels. Le symposium invitait également les participants à discuter des aspects sociaux et économiques de l’écologie.

À gauche, exemple du type de transport public pour se déplacer dans Portland, train électrique. À droite, l’entrée principale du « Portland Convention Center » accueillant les participants à la conférence de l’ESA.

A cette occasion, j’ai eu la chance de donner deux conférences auxquelles participaient également d’autres spécialistes en écologie. Ma première conférence portait sur une partie des résultats de ma recherche doctorale commencée en 2018 sous la direction de Jacques Brisson et Pierre-Luc Chagnon. 

Ma thèse vise à identifier des stratégies de revégétalisation des sols nus dans le but spécifique d’empêcher la croissance des arbres jugés indésirables dans certaines situations précises (emprises d’utilités publiques). Dans un premier temps, mes collaborateurs et moi-même avons développé une expérience dans des conditions contrôlées sur un site de recherche à Varennes. 

En 2017, cette expérience a impliqué l’ensemencement de mélanges herbacés avec une variation de la diversité en espèces (de 1 à 9), suivi de l’ensemencement des érables rouges et des bouleaux gris pendant trois années consécutives (2017-2019). Nous avons constaté que certains mélanges d’herbacés suscitent l’inhibition de l’établissement d’arbres. Par exemple, nous avons identifié que les mélanges les plus efficaces, qui bloquaient l’établissement d’arbres, comprenaient deux espèces clés, à savoir l’achillée millefeuille et la verge d’or. 

En 2020, nous avons mené une deuxième expérience à Pointe-aux-Trembles, au cours de laquelle nous avons ensemencé des parcelles avec trois mélanges (3, 6 et 9 espèces), tous contenant de l’achillée millefeuille et de la verge d’or. Par la suite, nous avons laissé la pluie de semences d’arbres à proximité ainsi que la végétation herbacée spontanée s’installer. Notre surprise a été de constater que nos mélanges herbacés dans cette expérience n’ont pas empêché la croissance des arbres De nouvelles questions se sont donc posées. Est-il nécessaire de prendre en compte les variations climatiques? Pourquoi la végétation finale était-elle principalement composée d’espèces autres que nos mélanges de graines herbacées? Sommes-nous capables de prédire l’établissement des arbres et de prendre les meilleures décisions sur la sélection des espèces herbacées à utiliser dans un projet de revégétalisation?

Différentes infrastructures humaines nécessitent l’élimination complète de toute végétation. Leur gestion nécessite également une revégétalisation rapide afin de prévenir l’érosion du sol, d’améliorer l’esthétique du paysage et parfois d’empêcher l’implantation d’arbres qui pourraient être incompatibles avec les nouveaux écosystèmes semi-naturels.

Ma deuxième conférence m’a permis d’établir avec les autres conférenciers invités et les participants un dialogue sur les défis auxquels est confrontée la communauté latino dans le monde de la recherche universitaire. La session intitulée « ¿Cómo haces ecología? Como você faz ecologia? How do you do ecology? Latine voices in our community of ecologists » était un espace de réflexion sur la manière dont nos expériences vécues et notre identité façonnent notre façon de faire de l’écologie. Pour la première fois lors de la réunion annuelle de « l’ESA », les conférences se sont déroulées dans un format multilingue, ce qui a facilité énormément le transfert d’idées. Un format multilingue présente l’avantage de permettre aux participants de converser dans leur langue de confort, rendant la conversation plus fluide. En effet, la personne qui parle est moins préoccupée et stressée, ce qui lui permet de se concentrer davantage sur le contenu des idées plutôt que sur la recherche d’une structure linguistique correcte. Ce format facilite également l’accessibilité du public qui pourrait ne pas maîtriser parfaitement l’une des langues utilisées lors d’une présentation orale ou écrite. Cependant, il présente également des désavantages. Par exemple, lors d’échanges oraux, la répétition de la même information dans deux langues différentes peut alourdir la communication. De plus, certaines personnes pourraient être choquées si l’on favorise une langue plus que l’autre. À mon avis, un format multilingue reste toujours souhaitable car il permet d’intégrer et d’inclure un plus grand nombre de personnes lors d’une conversation portant sur une thématique d’intérêt commun.

L’équipe de la session « ¿Cómo haces ecología? Como você faz ecologia? How do you do ecology? Latine voices in our community of ecologists » quelques minutes avant de présenter nos exposés pleins d’expériences et d’anecdotes sur notre façon de faire de l’écologie.

Ma participation au congrès annuel de l’ESA fut une aubaine, car elle m’a permis d’établir des contacts avec des chercheurs dans mon domaine d’intérêt en écologie. Une rencontre qui m’a particulièrement marqué fut avec l’’un des éditeurs de la revue PLOS ONE, Miquel Vall-llosera Camps, qui a voyagé depuis le Royaume-Uni. Nous avons discuté de la manière dont l’identité et les expériences personnelles des chercheurs influent sur notre manière de faire de la recherche en écologie, et parlé des défis auxquels sont confrontés les chercheurs non-anglophones pour réussir dans le monde universitaire. Nous avons également discuté des stratégies à prendre en compte lors de la sélection d’une revue scientifique pour publier nos résultats de recherche. Ce fut une conversation très agréable, d’autant plus que nous avons tous les deux suivi, chacun à sa manière et à des dates différentes, une formation universitaire dans le domaine de l’écologie en Catalogne.

J’ai également eu la chance de rencontrer ma collègue Marie Saydeh de l’Université Laval qui, comme moi, a pu participer au congrès grâce au prix d’excellence du CSBQ. J’ai trouvé l’expérience très enrichissante, car j’ai eu l’occasion de mettre en pratique ma communication scientifique devant un public large et international. Une chose très importante à noter est l’accès au centre de convention, qui est incroyablement facile par les transports publics dans un format bilingue anglais-espagnol.

Pendant mon temps libre, j’ai pu rendre visite à ma famille dans la section agricole de Cornelius, visiter des espaces verts emblématiques tels que l’ « International Rose Test Garden » et, le week-end, faire une escapade fugace à « The Dalles » et autour du « Mont Hood ». J’ai été stupéfait de voir le changement notable des types de végétation entre la côte pacifique verdoyante et la partie continentale semi-désertique de l’Oregon, et l’importance accordée par la ville de Portland aux forêts urbaines comme l’immense arboretum urbain « Hoyt Arboretum ».

Vues panoramiques du Mont Hood et du fleuve Columbia. Il est également possible de voir une partie de la collection de roses de l’ « International Rose Test Garden » et l’entrée de l’arboretum urbain « Hoyt Arboretum ».

Un grand merci à l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV) at au CSBQ de faciliter la participation à des conférences aussi enrichissantes que celles de « l’ESA » !

A propos l’auteur : Rolando Trejo-Pérez est candidat au doctorat à l’Institut de Recherche en Biologie Végétale (IRBV) de l’Université de Montréal depuis 2018. Ses recherches portent sur la revégétalisation des sols mis à nu dans les infrastructures humaines comme stratégie de contrôle des espèces indésirables telles que les arbres. Sa grande curiosité pour la diversité végétale l’a amené à explorer presque tous les parcs et réserves fauniques nationales du sud du Québec, à l’exception de l’île d’Anticosti (visite à venir bientôt).

À gauche, une journée de travail dans la serre au Jardin botanique de Montréal. À droite, près d’un arbre exceptionnel dans le parc national d’Aiguebelle en Abitibi-Témiscamingue.
Post date: February 19, 2024

1 Comment

  1. Jean Michel Boisvert

    Absolutely astonishing! Sending students abroad for international conferences is indeed a wise social and scientific investment.

    Reply

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