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Compte-rendu d’un atelier sur les dynamiques de pouvoir dans le monde académique à la conférence annuelle de la Société Canadienne d’Écologie et d’Évolution

Par Jeanne Clermont et Anne Ju Laberge, Stagiaire postdoctorale et étudiante à la maîtrise, respectivement, à l’Université de Sherbrooke

En mai dernier, nous avons toutes les deux présenté les résultats de nos travaux de recherche à la conférence annuelle de la Société Canadienne d’Écologie et d’Évolution (SCÉÉ), qui s’est tenue à Vancouver du 26 au 29 mai 2024. La participation de Jeanne à ce congrès a été rendue possible grâce au soutien financier du CSBQ. Nous profitons de l’invitation à soumettre un article au Beagle pour partager avec la communauté du CSBQ un compte-rendu d’un atelier tenu le premier jour de la conférence.

L’atelier était intitulé « Équité et hiérarchies de pouvoir en écologie et en évolution – de la dynamique individuelle et interne d’un laboratoire aux héritages structurels dans le monde universitaire ». Il a été organisé par le groupe de travail de la SCÉÉ pour l’équité en écologie et en évolution (Section Working for Equity in Ecology & Evolution Today, SWEEET, https://sweeetecoevo.weebly.com/). Nous remercions d’abord les organisateurs et organisatrices de l’atelier: Carling Bieg, Megan Brownlee, Jasmine Veitch, Kelly Forrester et Anne Ju Laberge, et soulignons la participation des panélistes : Drs. Allyson Menzies, Carly Ziter, Jacqueline Litzgus et Warren Cardinal-McTeague, qui ont fait de ce workshop une expérience très formatrice. 

Le logo de SWEET

L’activité était divisée en deux parties abordant d’abord les dynamiques de pouvoir au sein des institutions et ensuite les dynamiques au-delà des institutions, lors de partenariats et collaborations. Les discussions générées nous ont permis de pousser nos réflexions au-delà des sujets ciblés par l’équipe organisatrice. Notamment, pendant cet atelier SWEEET, les panélistes ont partagé leurs réflexions et observations sur les dynamiques de pouvoir au sein des relations entre personnes superviseures et personnes étudiantes, des réseaux de collaboration, et des institutions. Ils ont également discuté des dynamiques de pouvoir liées à la collecte et à l’utilisation des données en territoires autochtones. Finalement, les panélistes ont discuté des défis actuels pour les jeunes chercheurs et chercheuses souhaitant être des agents de changement, tout en proposant des pistes de solution et plusieurs conseils concrets. 

Pendent l’atelier

Plus précisément, les dynamiques de pouvoir entre deux ou plusieurs personnes reposent sur la manière dont le pouvoir est perçu et distribué. Ces dynamiques sont particulièrement importantes dans les relations où une échelle hiérarchique est présente, que ce soit par l’âge, l’expérience ou la chronologie des évènements. Évidemment, ces relations peuvent rapidement devenir toxiques, particulièrement lorsque la hiérarchie est mise de l’avant. Lors de l’atelier, nous avons ainsi abordé comment avoir des relations saines malgré ces jeux de pouvoir très présents. Voici un résumé des sujets abordés qui ont le plus résonné pour nous :

Comment briser les dynamiques de pouvoir entre personnes superviseures et personnes étudiantes?

  • À plusieurs reprises, les panélistes ont souligné l’importance de bâtir des relations de confiance avec les personnes étudiantes sous leur supervision. Mots clés : honnêteté, transparence, tout en respectant les limites de chacun et chacune.
  • Une personne superviseure devrait discuter ouvertement des dynamiques de pouvoir dans le milieu académique avec les personnes étudiantes qu’elle dirige. 
  • Il faut créer un milieu où tout le monde est à l’aise de nommer les choses ressenties. L’importance de valider les sentiments des autres pour atténuer le « syndrôme de l’imposteur » a été mise de l’avant.
  • En tout temps et contexte, il faut prioriser le bien-être de tout le monde, et ainsi ne jamais prioriser les publications aux personnes.
  • En tant que personne superviseure, il est important de toujours se remettre en question, repenser la manière dont les choses sont faites, particulièrement dans le cadre de projets à long-terme. Les mots d’une personne superviseure sont impactants pour les personnes sous sa supervision, il est donc important d’en être conscient. 
  • Il est également important de promouvoir la diversité de parcours aux études graduées, afin d’être plus inclusif, notamment dans le cas des personnes étudiantes issues de communautés autochtones.

Pistes sur comment briser les dynamiques de pouvoir entre collègues ou collaborateurs et collaboratrices.

  • Les personnes issues de communautés minoritaires devraient pouvoir occuper des postes de pouvoir, ou de leadership, et pas seulement être des collaborateurs ou des collaboratrices sur les différents projets.
  • Dans le cas de travail avec les communautés autochtones : ne pas être « extractif ». L’établissement de bonnes relations prend du temps. Dans le cas de bons partenariats, les bénéfices sont mutuels.
  • L’importance de bien choisir les personnes avec qui l’on collabore a été soulignée à plusieurs reprises.

Conseils plus spécifiques :

  • Chaque laboratoire devrait avoir son propre code de conduite, qui mentionne notamment combien d’heures les personnes étudiantes devraient travailler chaque semaine, et les politiques du laboratoire en termes de vacances, congé maladie, etc. 
  • Le code de conduite devrait être revu fréquemment. Il devrait être révisé en groupe lors de réunions de laboratoire, par exemple au début de chaque session.
  • S’il y a des tâches communes à effectuer au sein du laboratoire, prendre le temps au début des sessions de bien établir qui aura la charge de quoi.
  • Encourager les personnes étudiantes à respecter des heures de travail spécifiques, ce qui en fin de compte pourrait aider à régler des problèmes de productivité s’il y a lieu. 
  • Inclure au code de conduite une liste de ressources disponibles (dont celles de l’université) à laquelle tout le monde peut se référer en cas de besoin, dans le laboratoire à l’université ET sur le terrain. Dans le cas de travail de terrain en milieu isolé, il faut définir des personnes ressources à l’avance, car les moyens de communication peuvent être limités. Cela pourra aider si des situations délicates et chargées en émotion se présentent en donnant une option aux personnes victimes de ces situations.
  • Veiller à ce qu’il y ait des options et plusieurs voies de communication. C’est important que les personnes étudiantes aient d’autres personnes vers qui se tourner au-delà de leur direction de recherche et leurs collègues.

En conclusion, cet atelier nous a fait beaucoup réfléchir et nous a également beaucoup instruites. En tant que jeunes femmes chercheuses à différentes étapes dans leur parcours, il est important d’être bien outillé pour affronter ces dynamiques de pouvoir qui sont et seront toujours présentes et qui, malheureusement, affectent d’autant plus les minorités. Cet atelier nous a permis de nous poser des questions sur les solutions à rechercher et les actions à prendre dans le cas de relations de pouvoir malsaines. Nous allons même utiliser les conseils nommés lors de l’activité dans notre propre quotidien et espérons que collectivement un effort sera mis pour déconstruire ces dynamiques de pouvoir.

Le comité organisateur et les panélistes

A propos des l’auteures :

Jeanne est actuellement stagiaire postdoctorale à l’Université de Sherbrooke, dans le laboratoire de la Dre Fanie Pelletier. Ses recherches en écologie animale évaluent les effets de la prédation sur la dynamique des populations de proies.

@clermont_jeanne

Anne Ju termine actuellement sa maîtrise à l’Université de Sherbrooke, dans le laboratoire de la Dre Fanie Pelletier. Son projet de recherche évalue la croissance néonatale des chiots phoques communs résidant dans l’estuaire du Saint-Laurent. 

@AnneJuLaberge

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Post date: August 29, 2024

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