Enable Dark Mode!
SCEE 2024 à Vancouver : immersion dans les idées et les conifères géants

Par Jocelyn Lauzon, Étudiant à la maîtrise en biologie à UQAM

Des forêts de conifères gigantesques, des plages longeant la mer, des jardins botaniques et trois jours de discussions et de réflexions sur l’écologie et l’évolution… quoi de mieux pour lancer la saison estivale! Grâce à un prix d’excellence qui m’a été décerné par le CSBQ, j’ai atterri à Vancouver à la fin mai pour participer à la réunion annuelle 2024 de la Société canadienne d’écologie et d’évolution (SCEE) qui se déroulait sur le splendide campus de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). J’étais accompagné de mon superviseur et d’une autre étudiante de mon labo; le contexte convivial du congrès était idéal pour présenter pour la première fois les résultats de mon projet de recherche de maîtrise devant chercheur.e.s et collègues d’autres universités canadiennes. 

Canopée coniférienne dans le Pacific Spirit Regional Park.

J’ai décidé de me rendre à Vancouver quelques jours avant le début du congrès pour visiter la ville et ses parcs adjacents. J’ai loué une toute petite maison très chaleureuse dans le quartier East Vancouver, ce qui m’a permis d’explorer tout autour (en plus de découvrir de délicieux restaurants locaux). Parenthèse pragmatique, une des choses que j’ai beaucoup appréciée de Vancouver est l’efficacité et l’étendue de son réseau de transport en commun, qui m’a permis de transiter d’un quartier à l’autre très facilement, et surtout d’accéder à la nature en desservant le trajet menant à plusieurs parcs régionaux en périphérie des quartiers North et West Vancouver.

Maison louée dans East Vancouver.

J’ai joué pendant quatre jours à l’explorateur naturaliste en quête de plantes, d’oiseaux et de paysages, seul ou accompagné d’amis rejoints sur place. J’ai visité le parc régional de Pacific Spirit entourant le campus de l’UBC, le parc du Lynn Canyon avec son fameux pont suspendu, le parc régional de Lynn Headwaters abritant des forêts de Pruche de l’Ouest (Tsuga heterophylla) et de Sapin gracieux (Abies amabilis), le parc de Cypress Falls avec sa magnifique chute (et une mystérieuse carcasse de voiture surplombant vertigineusement le bassin de la chute!) ainsi que le Lighthouse Park, un coup de cœur pour sa biodiversité, ses énormes Sapin de Douglas (Pseudotsuga menziesii) et Thuya géant (Thuja plicata) ainsi que ses paysages maritimes et son potentiel pour le tide pooling. J’en ai aussi profité pour me balader dans les jardins botaniques de VanDusen et de l’UBC, avec son époustouflante passerelle dans la canopée. Et bien sûr, que serait un voyage à Vancouver sans une promenade dans son classique Stanley Park? C’est là que, à mon étonnement, j’ai dénombré la plus grande richesse aviaire de mon voyage; c’est un parc urbain véritablement incontournable!

Chute aperçue du pont suspendu du Lynn Canyon.
Tronc du Sapin de Douglas (Pseudotsuga menziesii), recouvert de mousses.

Forêt de Pruche de l’Ouest (Tsuga heterophylla) et de Sapin gracieux (Abies amabilis), au parc régional de Lynn Headwaters.
Chute du parc Cypress Falls.
Greenheart TreeWalk, passerelle dans la canopée au jardin botanique de l’UBC.
Vieille voiture accidentée dans le parc Cypress Falls, qui a généré plusieurs hypothèses sur ce qui a bien pu arriver cette nuit-là…
Arbousier d’Amérique (Arbutus menziesii) poussant sur un rocher bordant la baie de Burrard et le détroit de Géorgie, au Lighthouse Park.
Troncs de Thuya géant (Thuja plicata), au Lighthouse Park.
Étoile de mer, mollusques et crustacés dans un tide pool, au Lighthouse Park.
Beaver Lake, Stanley Park.

Mes découvertes ne se limitent pas à mon séjour en nature. La réunion annuelle de la SCEE a également été riche en apprentissages, en questionnements et en idées. Dès la première matinée du congrès, j’ai présenté certains des résultats de mon projet de recherche. Mon mémoire porte sur l’écologie et l’évolution microbienne au sein de la phyllosphère; plus précisément sur les bases génétiques des adaptations d’un genre bactérien, Methylobacterium, à différentes espèces d’arbres hôtes de la forêt tempérée de l’Est canadien. J’ai démontré que, dans mon système d’étude, l’espèce hôte expliquait 25% de la variation dans le contenu génétique des communautés de Methylobacterium de la phyllosphère (Figure 1). Parmi les gènes bactériens associés à des espèces ou des types d’hôtes particuliers, j’ai découvert des gènes impliqués dans la photosynthèse anoxygénique, le métabolisme du méthane et le métabolisme des acides aminés.

Figure 1 – La composition en gènes accessoires des communautés de Methylobacterium dans la phyllosphère varie en fonction de l’espèce d’arbre hôte.
Jocelyn Lauzon, durant sa présentation. Crédit photo : Sarah Ishak.

Après ma présentation, j’ai eu l’occasion durant trois jours d’assister à des exposés de grande qualité sur des sujets qui m’intéressent particulièrement, tels que l’évolution adaptative, la biogéographie, l’écologie des communautés, l’effet de priorité et la conservation. J’étais ravi qu’une bonne proportion du contenu porte sur l’écologie microbienne puisque ces exposés m’ont permis d’approfondir mes réflexions sur ma propre recherche, à la fois au niveau de la manière d’aborder ou d’interpréter la théorie écologique chez les microorganismes et au niveau des différentes méthodes expérimentales et analytiques. J’ai eu des discussions enrichissantes avec plusieurs professeur.e.s et étudiant.e.s au sujet de leurs projets respectifs et des perspectives de la recherche en écologie. 

La réunion annuelle de la SCEE était ma deuxième expérience dans un congrès scientifique, mais c’était la première fois que je présentais oralement les résultats de ma recherche, et ma première expérience du genre à l’extérieur de Montréal et dans ma langue secondaire, l’anglais. Ma présentation s’est très bien déroulée et j’ai reçu de nombreux commentaires positifs et constructifs pour la suite de mes analyses. J’ai aussi appris une importante leçon que je partage ici et qui intéressera surtout les personnes moins expérimentées dans ce type d’événement. C’est évidemment primordial de bien préparer son exposé officiel, mais il est également essentiel de s’exercer à présenter son sujet de recherche de manière claire, concise et intéressante (un résumé de 30 secondes à 1 minute) dans un contexte informel où quelqu’un nous demande en quoi consiste notre travail – par exemple une personne rencontrée par hasard durant une pause café, ou encore qui nous est présentée par un collègue. Ce conseil vaut d’autant plus lorsqu’il faut s’exprimer dans une langue qu’on ne maîtrise pas parfaitement. Cela peut éviter des situations embêtantes où on se retrouve à trébucher dans les mots et à complexifier des concepts déjà assez complexes en soi! Je parle d’expérience et je suis maintenant toujours prêt à présenter mon sujet de recherche de manière inattendue au détour d’une conversation en anglais autour d’un café (de trop…) et d’un muffin aux carottes!

Enfin, la réunion de la SCEE – et du fait même mon voyage à Vancouver – s’est conclue par un agréable banquet au sein du jardin botanique de l’UBC, avec ami.e.s et collègues assis dans l’herbe, entourés d’une diversité inouïe de plantes, sous un ciel coloré par les lueurs crépusculaires. Je remercie chaleureusement le CSBQ pour l’octroi d’un prix d’excellence qui m’a permis de participer à cet événement marquant pour ma carrière de chercheur. J’ai déjà hâte de retourner sur la côte ouest pour continuer mon exploration de sa biodiversité. D’ici là, je compte bien participer à l’édition 2025 de la réunion annuelle de la SCEE qui se déroulera à l’Université de Sherbrooke, et qui sait si j’y présenterai une affiche sur mon projet de doctorat?

A propos l’auteur : Jocelyn Lauzon est étudiant à la maîtrise en biologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Dans le laboratoire du Pr Steven Kembel (https://kembellab.ca/), Jocelyn étudie l’écologie et l’évolution d’un genre bactérien, Methylobacterium, dans la phyllosphère. Il s’intéresse particulièrement aux adaptations génétiques à différentes espèces d’arbres hôtes de la forêt tempérée. Passionné par la biodiversité, Jocelyn est également audionaturaliste et partage ses enregistrements sonores de la faune et des écosystèmes québécois sur son site web (https://loiseauson.com/), ainsi que par le biais de nombreuses collaborations interdisciplinaires.

Post date: September 02, 2024

0 Comments

Submit a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *